Un ratio pour trouver les vrais champions de la rentabilité

Offert par Les Affaires


Édition du 22 Septembre 2021

Un ratio pour trouver les vrais champions de la rentabilité

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Édition du 22 Septembre 2021

EXPERT INVITÉ. Partant de la prémisse qu’il faut se concentrer sur les sociétés de qualité supérieure, quels devraient être les critères pour les dénicher?

A mon avis, le premier critère devrait être ce qu’on appelle le rendement du capital investi qu’obtient une entreprise à long terme. En anglais, on appelle ce ratio ROIC, pour Return on Invested Capital. Comme l’a dit Warren Buffett, «l’entreprise idéale est celle qui réalise des rendements très élevés de son capital et qui continue d’utiliser beaucoup de capital à ces taux de rendement élevés. Ce sont de telles sociétés qui deviennent des machines à intérêts composés».

Il est assez facile de déceler les sociétés qui obtiennent un rendement du capital élevé; il n’y a qu’à faire ce calcul relativement simple: ROIC = Bénéfice net au cours d’une année/Capital moyen utilisé au cours de cette année

Au moins deux éléments sont à considérer. Il existe plusieurs manières de calculer le ROIC. Je préfère personnellement la formule la plus simple, mais elle s’applique mieux aux entreprises peu endettées. D’autre part, je suggère d’éliminer tout élément extraordinaire tel que, par exemple, un gain non récurrent provenant de la vente d’un actif immobilier ou une charge légale. En ce qui a trait au «capital moyen utilisé», on prend simplement la moyenne du total des actifs pour Tannée étudiée (actif total au début + actif total à la fin/2). Nous apporterons toutefois un ajustement à ce calcul dans le cas d’entreprises qui possèdent une importante encaisse nette en excluant cette somme du capital.

Dans la plupart des cas, le bénéfice net d’une société procurera un chiffre qui s’approche de ses bénéfices «économiques», mais il sera parfois utile de leur substituer les flux de trésorerie libres. En effet, certaines sociétés, surtout celles qui réalisent beaucoup d’acquisitions, affichent des charges d’amortissement particulièrement élevées qui viennent en quelque sorte masquer leur véritable rentabilité.

Règle générale, une entreprise dont le rendement du capital investi est faible ou qui ne surpasse pas son coût moyen de capital suggère un modèle d’affaires non soutenable ou peu attrayant à long terme.

Par ailleurs, il vaut mieux ne pas trop se fier à une seule année. Nous préférons les sociétés qui affichent un rendement du capital investi élevé depuis plusieurs années et, idéalement, un rendement croissant.

À COTE 100, nous recherchons les entreprises dont le rendement du capital est supérieur à 10% depuis plusieurs années. Idéalement, ce rendement excédera 15%, ce qui fait d’une entreprise une championne de la rentabilité et de l’efficacité.

Une fois que vous avez trouvé une société dont le ROIC est élevé, la question à se poser est: «Pourra-t-elle continuer de le faire pendant de nombreuses années en réinvestissant une grande partie de ses bénéfices?»

Pour répondre à cette question, il faut selon moi évaluer plusieurs facettes du modèle d’affaires d’une entreprise et du secteur dans lequel elle évolue:

 

1. La possibilité de réinvestir les bénéfices avec de bons rendements

Une industrie qui offre de nombreux débouchés de croissance et de développement est un critère important. Les investissements consentis en recherche et développement et l’efficacité de tels investissements prennent alors toute leur importance stratégique. Parfois, les occasions d’investissement viendront d’acquisitions, comme c’est le cas pour des sociétés comme Couche-Tard ou CGI.

 

2. La capacité de la direction de bien réinvestir le capital excédentaire de la société

La feuille de route à long terme de l’équipe de direction est un excellent indicateur de cette capacité. Nous privilégions les dirigeants qui possèdent beaucoup d’actions et dont la rémunération est en grande partie axée sur la performance financière de la société à long terme...

 

3. Des barrières à l’entrée élevées

Les sociétés qui réussissent à réaliser un rendement du capital investi élevé attireront tôt ou tard la concurrence. Il faut donc privilégier celles dont le modèle d’affaires est protégé par des barrières à l’entrée élevées qui empêcheront ou décourageront les concurrents potentiels. Parmi ces barrières, mentionnons les économies d’échelle, l’étendue d’un réseau de distribution, une marque de commerce reconnue, la nécessité d’investir des sommes substantielles ou la réglementation.

 

4. L’optionalité

Une entreprise qui jouit d’une forte santé financière, n’a pas de dette et détient beaucoup d’encaisse, bénéficie de beaucoup plus d’options d’investissement que celle qui est lourdement endettée. La capacité de dégager des flux de trésorerie libres importants donne aussi plus d’options à une entreprise.

En général, les titres de sociétés de grande qualité s’échangent à des ratios d’évaluation beaucoup plus élevés que le reste du marché boursier, ce qui est tout à fait normal. Toutefois, les marchés nous offrent parfois la possibilité d’acquérir de tels titres à des ratios d’évaluation raisonnables. Ces occasions peuvent résulter d’une correction générale des marchés boursiers ou d’une situation précise qui touche seulement une industrie ou une entreprise. C’est ce genre d’occasions qu’un investisseur devrait surveiller.

 

EXPERT INVITÉ
Philippe Le Blanc CFA, MBA,
est chef des investissements, COTE 100.

À propos de ce blogue

Philippe Le Blanc est gestionnaire de portefeuille chez COTE 100 et éditeur de la Lettre financière COTE 100+. Il est également l’auteur du livre Avantage Bourse et coauteur de La Bourse ou la Vie.

Philippe Leblanc
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