Seuls les fous ne changent jamais d'idée

Publié le 18/06/2021 à 13:40

Seuls les fous ne changent jamais d'idée

Publié le 18/06/2021 à 13:40

Warren Buffett (Photo: Getty Images)

BLOGUE INVITÉ. Une des facettes que j’admire le plus chez Warren Buffett est qu’il a su s’adapter et ajuster sa manière d’investir au fil des nombreuses décennies de sa carrière d’investisseur.

Au départ, dans les années 1950, il a connu beaucoup de succès en investissant dans des titres recelant beaucoup de «valeur», des titres qu’il pouvait acheter à 0,50$ alors qu’il les évaluait à 1$. C’était essentiellement la méthode que lui avait inculquée son mentor et professeur, Benjamin Graham. À l’époque, Buffett ne prêtait pas encore beaucoup d’attention à la qualité d’une entreprise, tant qu’il pouvait acheter le titre à fort escompte par rapport à son estimation de sa valeur intrinsèque.

Avec les années, sa façon de voir les choses a évolué et il a commencé à prêter une attention toute particulière à la qualité d’une entreprise, à la durabilité de son modèle d’affaires. M. Buffett répète souvent que c’est grâce à son partenaire de longue date, Charlie Munger, qu’il a ajusté sa manière d’investir.

Je crois qu’un des premiers investissements de Berkshire Hathaway qui a confirmé sa nouvelle orientation vers des entreprises de qualité a été son achat de See’s Candies, un fabricant de bonbons et de chocolat, acquise en 1972 pour la somme de 25 M$ US. See’s avait déjà développé une marque de commerce reconnue en Californie et comptait sur une clientèle fidèle. De plus, le modèle d’affaires de la société nécessitait peu de capital et dégageait des flux de trésorerie libres importants, tout en réalisant des marges bénéficiaires élevées. Dans la lettre annuelle aux actionnaires de Berkshire Hathaway de 2019, Buffett mentionne que, depuis son acquisition en 1972, See’s Candies avait dégagé des bénéfices avant impôts de plus de 2,0 G$ pour Berkshire.

 

Ouvrir ses horizons

Cet investissement a, à mon avis, mis la table pour d’autres investissements de Berkshire Hathaway dans des sociétés de grande qualité telles que Coca-Cola en 1988 ou l’acquisition du reste de la société d’assurance GEICO en 1996.

Puis, Berkshire Hathaway a acquis la totalité des actions qu’elle ne détenait pas de Burlington Northern Santa Fe (BNSF) en 2010 pour la somme de près de 34 G$ US. À ma connaissance, avant cet investissement, Berkshire n’avait jamais investi dans l’industrie du chemin de fer. Encore là, Buffett comptait sur les barrières particulièrement élevées du secteur et sur la durabilité du modèle d’affaires de BNSF.

Plus récemment, Buffett en a surpris plusieurs lorsque Berkshire Hathaway est devenue l'un des plus importants actionnaires d’Apple. La société possède aujourd’hui plus de 5% des actions de cette société technologique. Pourtant, Buffett avait toujours répété que la technologie sortait de son cercle de compétence! Or, au 31 décembre 2020, le coût de l’investissement de Berkshire Hathaway avoisinait 31,1 G$ US alors que sa valeur était de 120,4 G$ US, une plus-value de près de 90 G$ US.

L’évolution de la manière d’investir de Buffett est remarquable et elle est selon moi un exemple à suivre pour les investisseurs. De notre côté, il y a environ deux ans, nous avons pris la décision stratégique d’ouvrir nos horizons et de ne plus exclure les titres de sociétés étrangères dans notre univers de placement. Pourtant, nous avions toujours répété que nous préférions investir dans des sociétés nord-américaines qui font des affaires à l’international plutôt qu’investir directement dans des sociétés étrangères. J’ai moi-même écrit un blogue à ce sujet en 2014.

J’ajouterais que si l’on veut élargir graduellement son cercle de compétence à titre d’investisseur, il faut être prêt à sortir quelque peu de ce cercle – c’est la seule manière de continuer à s’améliorer. La décision d’élargir nos horizons à l’international nous a permis de dénicher quelques sociétés de qualité à bon prix au cours des dernières années. Seuls les fous ne changent jamais d’idée.

 

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

Chef des placements chez COTE 100

À propos de ce blogue

Philippe Le Blanc est gestionnaire de portefeuille chez COTE 100 et éditeur de la Lettre financière COTE 100+. Il est également l’auteur du livre Avantage Bourse et coauteur de La Bourse ou la Vie.

Philippe Leblanc
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