Le truc le plus génial que je puisse jamais vous confier

Publié le 16/03/2015 à 06:09

Le truc le plus génial que je puisse jamais vous confier

Publié le 16/03/2015 à 06:09

Ils ont en effet imaginé que la fameuse ‘chose superposée’ était nulle autre qu’un être humain, et par suite que deux êtres humains se retrouvaient dans cet univers-là pour y jouer au jeu du dilemme du prisonnier. Qu’est-ce que ça change? Essentiellement que la décision prise par l’un des joueurs est alors la résultante d’une superposition d’états psychologiques qui le traversent au moment de faire son choix. Des états psychologiques qui sont intriqués, en ce sens qu’ils sont à la fois liés et simultanés. Si bien que chacun des joueurs se doit d’établir sa propre ‘stratégie quantique’.

«La ‘stratégie quantique’ est nullement une fantaisie imaginaire née d’une astuce mathématique. Elle est un véritable reflet du processus de prise de décision dans un environnement empreint d’incertitudes et de probabilités. Elle met en évidence le fait que faire un choix ne découle pas d’un raisonnement purement linéaire et rationnel, mais plutôt d’un cheminement d’idées à travers différents états psychologiques, un cheminement fait de va-et-vient ‘incessant et simultané’ d’informations entre les différentes strates de la pensée. On le voit bien, la stratégie quantique représente une approche de la prise de décision nettement plus pertinente que les approches traditionnelles, même s’il est vrai que cette approche se présente surtout sous une forme mathématique», expliquent les deux chercheurs chinois dans leur étude.

Pour en apporter la preuve, ils sont partis d’une expérience menée en 1992 par Tversky & Shafir. Il avait été demandé aux participants de jouer à un jeu de pari : «50% de chances de gagner 200 dollars ; 50% de chances de perdre 100 dollars». Chacun était obligé de jouer une fois, puis devait faire un choix la deuxième et dernière fois : rejouer une fois; ou refuser de jouer une nouvelle fois, et en rester là. Résultats? La majorité de ceux qui avaient gagné la première fois (69%) et de ceux qui avaient perdu la première fois (59%) ont décidé de jouer une nouvelle fois.

En revanche – et c’est là le sel de cette expérience –, la majorité de ceux à qui on n’avait pas dit s’ils avaient gagné ou perdu la première fois (64%) ont préféré ne pas rejouer. Une décision jugée «irrationnelle» par les expérimentateurs, et même «excessivement irrationnelle» parce que disproportionnée par rapport au risque encouru : ces personnes-là ont littéralement «disjoncté» face à l’incertitude, appuyant leur décision en aucun cas sur la réflexion, mais entièrement sur l’émotion (la peur, en l’occurrence). Et les deux expérimentateurs de dénommer ce phénomène «l’effet disjoncteur», sans pouvoir lui donner d’explication très précise.

Or, Xiaowei Kong et Fei Xu se sont dit que l’approche de la stratégie quantique pourrait fournir un nouvel éclairage à l’effet disjoncteur. Ils ont, comme je l’ai déjà dit, projeté les deux joueurs du dilemme du prisonnier dans un univers quantique et reformulé en conséquence le modèle de calcul économétrique permettant d’identifier la meilleure décision à prendre pour chacun des joueurs. Et ce, non plus en fonction de son degré d’ouverture à la collaboration avec autrui, mais plutôt en fonction de la superposition de ses états d’esprit face à l’incertitude (aucun des deux ne sait à l’avance ce que l’autre va choisir de faire, à savoir collaborer ou trahir).

Prodigieux, n’est-ce pas? Car on entre là dans une toute autre dimension de notre perception de la prise de décision. Une dimension, je pense, plus profonde, plus proche de la complexité de notre cerveau. Et le plus beau, vous savez ce que c’est? C’est ce que tout cela leur a permis de découvrir :

À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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