Certaines dissolutions amènent du bon

Publié le 07/06/2019 à 14:00

Certaines dissolutions amènent du bon

Publié le 07/06/2019 à 14:00

Un bureau de Google.

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. La semaine dernière, des reportages ont refait surface comme quoi le Département américain de la Justice préparait une offensive antimonopole (antitrust) contre Alphabet (Google). La candidate démocrate à la présidence, Elizabeth Warren, a également lancé un appel pour que les géants de la technologie soient dissous.

En analysant la situation de plus près, on se rend compte que les régulateurs vont faire face à une bataille difficile. L'un des principes fondamentaux de la législation antitrust est la norme de la protection du consommateur. Cette norme établit si l'entreprise en question nuit au bien-être économique du consommateur, principalement par le biais de prix plus élevés et non compétitifs.

Le problème avec un géant de la technologie tel qu’Alphabet est que celui-ci ne fait pas payer l’usager pour l’utilisation de la plupart de ses produits. Il est vrai que le consommateur finit par payer en fin de compte par l’attention qu’il porte aux annonceurs, mais tout ceci est difficile à quantifier. Il devient alors ardu d’appliquer ici la norme de la protection du consommateur comme élément de preuve.

Il est également important de noter que le fonctionnement de ces nouveaux monopoles est complètement différent de ceux d'anciens industriels tels que John D Rockefeller. Les monopoles de l'époque contrôlaient toute la chaîne logistique. Aujourd'hui, la situation est complètement différente. Par exemple, prenons Facebook dont les utilisateurs agissent également en tant que fournisseurs (de contenu). Ces utilisateurs fournissent volontairement du contenu à la plateforme, sans être forcés par des industriels agressifs tels que Rockefeller.

Dans le pire des cas, imaginez une situation dans laquelle une entreprise comme Alphabet devrait être dissoute. Même s'il est vrai que la synergie de pouvoir acheter des annonces sur les différents produits via une seule plateforme serait perdue, il pourrait y avoir des avantages cachés à un tel scénario. Par exemple, Alphabet ne présente pas les résultats financiers de ses différentes divisions. En cas de scission, la communauté financière disposerait d’éléments distincts pour Google search, Youtube, Google Cloud, etc. Cette transparence accrue faciliterait la valorisation des différentes parties de l'entreprise. Il existe également un autre argument selon lequel la fragmentation des différents segments favoriserait des opérations moins bureaucratiques et donc plus ciblées.

D’un autre côté, lorsqu’on examine attentivement l'historique de la réglementation, on trouve de nombreux exemples où les entreprises en place ont bénéficié davantage de ses lois. Par exemple, les réglementations augmentent les coûts d’exploitation, ce qui rend la création d’une nouvelle entreprise plus difficile. Lorsque les compagnies de tabac ont été réglementées, la majorité de la publicité sur le tabac a été interdite. Ceci a permis aux sociétés en place de réduire leurs budgets de marketing et d’accroître leurs bénéfices. Avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) en Europe, qui impose aujourd’hui des règles de conformité strictes aux sociétés Internet, il est beaucoup plus facile pour les grandes entreprises de respecter ces règles que pour les start-up. Ceci va un peu à l’encontre du but de la réglementation.

Pour conclure, comme vous pouvez le constater, il arrive parfois dans le monde des affaires qu’une dissolution soit faite pour le mieux.

Patrick Thénière, CIM, Associé Barrage Capital

 

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