Transat, un titre en route vers de meilleurs jours


Édition du 19 Avril 2014

Transat, un titre en route vers de meilleurs jours


Édition du 19 Avril 2014

L'histoire s'amorce il y a quelques jours, au moment où notre collègue Martin Jolicoeur revenait d'une rencontre avec la direction de Transat.

«C'est intéressant, le transporteur a formé ses pilotes pour qu'ils puissent piloter de plus petits appareils, si bien que, pour la saison estivale, il pourra désormais utiliser des appareils mieux adaptés à ses besoins et ne plus être obligé de faire affaire avec CanJet. Annuellement, Transat épargnera 30 M$», dit-il.

- Wow !, 30 M$, c'est quand même pas mal. C'est 25 % du bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA) de l'an dernier.

Martin explique comment Transat s'y est prise dans notre section Stratégies (p. 23). Jetons de notre côté un coup d'oeil sur le potentiel du titre.

Les efforts budgétaires

L'effort de Transat au cours des dernières années en matière de contrôle des coûts est assez impressionnant. L'entreprise a réussi à retrancher 20 M$ en 2012, en diminuant l'effectif et les dépenses en général. Et un autre 15 M$, en 2013, en modifiant son fonctionnement et en éliminant un poste d'agent de bord dans ses A330.

Le plan actuel prévoit une récupération de 20 M$ en 2014 et de 20 M$ en 2015. La majeure partie des sommes récoltées viendront de la stratégie à laquelle on faisait référence plus haut. C'est donc 40 M$ que Transat vise à retrancher au cours des deux prochaines années. Et il y a, au surplus, un plan d'économies pour 2015-2017.

Restons-en cependant aux économies des deux prochaines années. Ces 40 M$ représentent en fait plus de 35 % du BAIIA.

La question qui se pose est : le BAIIA de 2013 (31 octobre) peut-il être maintenu afin de permettre aux économies de s'y ajouter ?

La menace du dollar canadien

C'est malheureusement assez mal parti de ce côté. Les résultats du premier trimestre ont été nettement plus faibles que ce qu'attendaient les analystes. Le consensus faisait état d'une perte de 16 M$, elle a plutôt été de 23,8 M$. La perte a en fait été plus forte que l'an dernier à la même période (21 M$), et ce, malgré la présence de certaines économies discutées précédemment. Autrement dit, les efforts de compression n'ont pas suffi à contrebalancer le décrochage.

Le décrochage vient en fait de la chute du dollar canadien par rapport à la devise américaine. La baisse du dollar a fait perdre 14 M$ au premier trimestre seulement. On peut imaginer ce que sera la suite sur l'année (le calcul est perfectible, mais 14 M$ multipliés par quatre donnent 56 M$, une perte nettement plus importante que les économies prévues de 20 M$ en 2014).

Évidemment, Transat impose des surcharges pour compenser en partie la glissade. Et il est possible que la devise remonte un peu au cours des prochains mois. Mais rien n'est certain. À moins d'une hausse des revenus, il semble presque assuré que les économies réalisées ne seront pas suffisantes pour permettre de maintenir la rentabilité de la société en 2014.

Les revenus peuvent-ils grimper ?

Le problème Rouge

De ce côté, ça s'annonce mieux. Pour la saison estivale qui s'amène, la capacité est en augmentation de 1 %, le taux d'embarquement est stable et les prix sont en hausse de 5 %. La direction estime que les coûts devraient de leur côté être en hausse de 6 %.

La difficulté ici est que seulement 27 % de la capacité a jusqu'à maintenant été vendue et qu'il est un peu tôt pour dire si la tendance se poursuivra. Marchés mondiaux CIBC note que la flotte d'Air Canada Rouge est actuellement de 14 appareils, mais qu'elle doit être portée à 33 à la fin de 2014. À titre de comparaison, Transat table sur une flotte de 25 à 30 appareils. La grosseur des porteurs est différente, mais c'est un peu comme si, dans les prochains mois, on faisait entrer sur le marché un nouveau Transat.

Tous ces appareils ne seront vraisemblablement pas introduits, mais il est difficile de voir les prix continuer de se maintenir à la hausse.

Comment évaluer Transat ?

L'exercice 2014 comportera son lot de turbulences. Il vaut probablement mieux regarder ce que pourrait être 2015 (31 octobre) pour tenter de jauger le potentiel du titre. Il est probable que l'industrie dans son ensemble réajustera ses prix pour contrebalancer la baisse du dollar canadien. Les pressions devraient être moins fortes, et certains analystes voient le titre de la société rebondir à près de 20 $ (Canaccord Genuity et Paradigm).

On est personnellement plus à l'aise avec le scénario le plus négatif de notre univers d'analystes, celui de la Financière Banque Nationale. Ce scénario prévoit pour 2015 un bénéfice de 30 % inférieur à celui des optimistes, et la cible pour le titre est à 10,50 $.

L'action se négocie aujourd'hui à environ 8,50 $. C'est un rendement potentiel de 25 %. Dans la situation la plus pessimiste.

Conclusion ?

Le titre de Transat pourrait bien être en transit vers de meilleurs jours. Mais avec encore quelques turbulences à traverser.

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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