F. Pouliot : la fusion SGF/Investissement Québec donnera lieu à un affrontement

Publié le 16/09/2010 à 08:16, mis à jour le 16/09/2010 à 15:24

F. Pouliot : la fusion SGF/Investissement Québec donnera lieu à un affrontement

Publié le 16/09/2010 à 08:16, mis à jour le 16/09/2010 à 15:24

Le ministre du Développement économique Clément Gignac. Photo : lesaffaires.com

Blogue. Le gouvernement du Québec fusionnera Investissement-Québec (IQ) et la Société générale de financement (SGF). Consensus en vue. Réservons cependant nos sièges pour cet automne, un intéressant affrontement se dessine sur le modèle d'intervention économique du Québec.

Il faut saluer la décision du ministre Clément Gignac de regrouper en une seule entité IQ et la SGF. Le nouveau véhicule facilitera la tâche aux entrepreneurs à la recherche de financement et permettra un meilleur démarchage international et une meilleure concertation stratégique. Plus efficace et, en plus, moins cher à exploiter. Il est prévu que les deux entités épargneront entre 10 et 15 M$ annuellement en coûts, elles dont les budgets de fonctionnement combinés atteignent 90 M$.

Les objections au regroupement ne devraient pas être nombreuses. La logique de l'exercice est difficilement attaquable et le PQ avait lui-même procédé à une consolidation du genre, il y a quelques années, en intégrant à la SGF quelques organismes satellites comme SOQUEM.

Le vrai débat

Il risque d'y avoir pas mal de spéculation aujourd'hui sur qui de Jean Houde (président du comité de transition), de Jacques Daoust (patron de IQ) ou de Pierre Shedleur (patron de la SGF) présidera la nouvelle entité.

Mais le débat le plus intéressant devrait se présenter un peu plus tard à l'automne, en commission parlementaire, lorsque le projet de loi sera déposé et que surviendront ces deux questions: quels seront les axes d'intervention de la nouvelle SGF/IQ et de quel budget disposera-t-elle?

Dans un coin les pro-interventionnistes de l'État, dans l'autre, les abstinents, adeptes de l'école d'Adam Smith et de la main invisible.

Le paysage actuel

Il en est plusieurs pour soutenir que le Québec est actuellement en surplus de capital de risque. Les programmes FIER (sous la responsabilité d'Investissement Québec) ont à plusieurs endroits de la difficulté à placer leur argent. Le Fonds de solidarité donne parfois l'impression d'investir ses deniers dans des sociétés qui n'affichent pas le profil de risque correspondant à la mission pour laquelle il a été créé (le Canadien de Montréal en est un exemple). Pendant ce temps, la Caisse de dépôt annonce qu'elle veut revenir plus fortement au Québec et se rapprocher des PME d'ici.

Il y a un coût pour l'État à procurer du capital. Les crédits d'impôt aux fonds de travailleurs et à Desjardins Capital régional et coopératif ont par exemple coûté l'an dernier près de 350 M$ aux deux gouvernements.

Évidemment, cette forme d'intervention fera l'objet d'attaques.

L'étendue des activités d'Investissement Québec et de la SGF aussi. Parce qu'il y a là aussi un autre coût pour l'État. N'envoie-t-on pas trop d'argent (emprunté par Québec) à ces organismes, les forçant ainsi à placer un peu désespérément une partie de leurs avoirs pour remplir leur mandat et ainsi brûler inutilement du capital?

Investissement Québec est rentable, mais elle pourrait peut-être l'être davantage si on diminuait ses objectifs de prêts.

La SGF a perdu 245 M$ en 2009, après en avoir perdu 261 M$ l'année précédente. Que l'on regarde sur cinq ou dix ans, elle ne permet pas au gouvernement de récupérer son coût en capital. Il y a des raisons historiques à cela, et on ne serait pas partisan de son enterrement. Mais la preuve reste à faire qu'elle a besoin d'investir 200-300 M$ chaque année dans l'économie du Québec. D'autant que ces millions ne sont investis que dans quatre axes d'intervention (1-agroalimentaire; 2-mines, matériaux, énergie, environnement; 3-produits forestiers; 4-technologie de l'information et science de la vie), ce qui vient diminuer ses options et augmente son risque.

De l'autre côté, les pro-interventionnistes feront sans doute valoir qu'à la suite de la crise financière, les banques canadiennes vont maintenant resserrer leur crédit, ce qui empêchera des entreprises à bon potentiel de poursuivre des activités plus à risque. D'où le besoin de maintenir l'aide actuelle.

Restons à l'antenne. M. Gignac vient subrepticement d'ouvrir le jeu, tout en cachant encore le sien.

 

 

 

 

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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