Abolition de poste: encaisser le coup pour mieux rebondir

Publié le 13/05/2021 à 07:00

Abolition de poste: encaisser le coup pour mieux rebondir

Publié le 13/05/2021 à 07:00

Patrice Lavoie

Cet échange empreint d’espoir et de lucidité avec Patrice Lavoie saura peut-être vous inspirer dans votre transition. (Photo: courtoisie)

BLOGUE INVITÉ. Patrice Lavoie a été directeur corporatif des affaires publiques et porte-parole de Loto-Québec pendant six ans. Il vient de perdre son emploi en raison d’une restructuration du secteur des communications de la société d’État, qui a été durement touchée par la pandémie.

Plusieurs cadres, dans de nombreuses organisations, ont perdu leur emploi dans le contexte de la pandémie. Est-ce toujours possible de mettre ça sur le dos du coronavirus? Peut-être pas. Reste qu’une perte d’emploi peut être reçue de différentes façons, et c’est la responsabilité de chacun de se recréer pour passer à la prochaine étape de sa carrière.

Cet échange empreint d’espoir et de lucidité avec Patrice Lavoie saura peut-être vous inspirer dans votre transition. 

 

Élise Boutin-Michaud (ÉBM): Après six ans comme directeur et porte-parole, comment expliques-tu cette fin d’emploi?

Patrice Lavoie (PL): Les organisations évoluent. La restructuration annoncée, dans un contexte de pandémie, d’économies à générer et avec ce qui s’en vient pour l’organisation, n’est pas dénuée de sens. Je comprends que des décisions difficiles doivent être prises et je les respecte.

Par ailleurs, le contexte dans lequel j’ai obtenu mon rôle il y a six ans a évolué. Je suis un porte-parole dynamique, très proactif et je ne manque pas une occasion de représenter mon organisation avec mon style bien à moi, basé sur mes valeurs, mon engagement et qui je suis fondamentalement. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai été choisi à l’époque.

Depuis 2015, l’image médiatique de Loto-Québec a évolué, elle est plus jeune, plus accessible, plus positive et plus responsable. Je me dis «mission accomplie».

Depuis la pandémie, les besoins sont différents. Honnêtement, étais-je encore la meilleure personne dans le contexte actuel et à venir? Je ne crois pas.

 

ÉBM: Quel message aimerais-tu partager aux autres cadres ayant perdu leur emploi récemment?

PL: Restez positifs! Et ne laissez pas votre égo être meurtri. Voyez cet événement comme une opportunité de vous réinventer dans un nouveau défi, avec une nouvelle équipe.

C’est difficile comme nouvelle, mais la perte d’un emploi ne diminue pas votre valeur. Vous restez compétents. Vous restez bons dans ce que vous faites. On continue de vous aimer.

Ne le prenez pas personnel : ayez espoir et retroussez vos manches! Vous retrouverez un rôle qui vous fait sentir sur votre « X ». Il est souvent difficile d’évaluer si le niveau des postes affichés est le bon, mais il faut parler aux recruteurs, ils sauront vous guider.

 

ÉBM: Comme porte-parole et personnalité très suivie sur les médias sociaux, comment gères-tu le délicat équilibre entre mettre en valeur ton employeur ou ta propre personne?

PL : Bonne question! Quand je parle d’un style bien à moi, ça fait aussi référence au fait que le « brand » Patrice Lavoie existe aussi en parallèle de l’organisation que je représente. Qui je suis et mes valeurs rejaillissent positivement sur l’organisation, et vice-versa. Pour éviter la confusion des genres, je me donne des lignes directrices de types de contenus en fonction des plateformes où je suis présent.

Certains porte-paroles s’effacent complètement derrière l’image de marque qu’ils représentent. Pour ma part, je préfère rester moi-même, je m’assume et j’ai envie de travailler pour une entreprise qui comprend la valeur ajoutée d’un communicateur fort et qui ne veut pas qu’un porteur de message.

 

ÉBM: Sur les médias sociaux, tu es ouvertement gai, tatoué, fan de cosplay, et tu portes fièrement un style rétro avec la moustache et le mulet. Tu prends la parole et soutiens des causes qui te tiennent à cœur tout en étant porte-parole de grandes entreprises. Quels sont tes trois conseils que tu donnerais pour bien gérer son image personnelle et professionnelle sur les médias sociaux?

PL : D'abord, Il faut définir sa ligne éditoriale et savoir doser ce qui est personnel et professionnel, selon les plateformes. Par exemple, sur TikTok, c’est clair : c’est 100 % personnel. J’y exerce ma créativité avec des publications positives, ludiques ou inspirantes sur l’estime de soi, l’acceptation de son corps et le cosplay, entre autres.

De plus, j’essaie d’avoir un bel impact dans la vie des gens. J’ai plus de 150 000 abonnés et je reçois des messages chaque semaine de gens qui me suivent qui me disent que je suis leur créateur préféré, que je les aide à passer au travers de la pandémie et que je mets un sourire dans leur journée. Ou des jeunes que j’inspire à faire un coming-out. C’est précieux. Tandis que sur LinkedIn, mes publications sont axées sur la gestion, et touchent presque à 100 % mon rôle professionnel. Sur les autres plateformes, les proportions diffèrent, mais j’ai un gabarit pour chaque plateforme qui m’aide à respecter mes lignes éditoriales. Ça se gère bien.

Ensuite, il faut avoir une cause et un message à livrer avant tout et non chercher à être populaire juste pour être populaire. Il faut rejoindre les gens en étant authentique dans nos propos, et porter un message positif. J’assume qui je suis dans la vie tout comme dans le monde numérique. Je n’essaie pas de faire des choses « à la mode » qui ne me ressemblent pas pour accroître mon nombre d’abonnés. Ce n’est pas moi et le public le sentirait si j’étais faux.

Le dernier est simple, mais important : toujours se demander avant de publier, est-ce que je serais à l’aise que mon groupe d’amis ou ma mère voit ceci?

Je pense entre autres aux internautes qui publient des photos ou des vidéos sexy, dans le but d’être sexy. Pas de jugement, mais soyez certains que vous l’assumez, car ça reste. Dans le doute, réfléchissez-y jusqu’au lendemain. Moi, 100 % de ce que vous voyez est assumé. Sinon, c’est supprimé avant d’être publié.

 

ÉBM: Pour finir, au-delà de l’image, parle-nous de toi en ce moment.

 PL : (petit rire) Je suis serein, très fier et très reconnaissant envers Loto-Québec de m’avoir permis d’avoir cet emploi pendant six ans. Bien entendu, je vais m’ennuyer de mes collègues et du poste que j’aimais, que j’ai créé à mon image, mais je vais très bien. Les gens qui m’envoient des messages d’appui s’attendent à ce que je sois à ramasser à la petite cuillère (rire). Ce n’est pas mon genre. C’est un choc, mais aussi une belle occasion de trouver un nouveau défi pour l’intrapreneur que je suis. Les centaines de messages d’empathie que je reçois me font aussi beaucoup de bien. Je vais les relire les jours où j’ai moins le moral (rire).