Faites comme Bono, devenez investisseur d'impact

Publié le 08/01/2018 à 12:01

Faites comme Bono, devenez investisseur d'impact

Publié le 08/01/2018 à 12:01

Le chanteur Bono porte le message de l'investissement d'impact

Bono investit dans RISE; 1ière plateforme d'investissement d'impact canadienne, MacKenzie et les femmes...

Bono et UBS Warburg : même combat

Vous avez souhaité la paix dans le monde au réveillon au tournant de 2017? Ô combien souhaiteriez-vous avoir les moyens de Bono pour les réaliser. Bono a co-créé Rise en 2017.

Rise, pour moi, c’est une marque de kombucha. Mais pour la suisse UBS Warburg, la plus grande banque privée du monde, c’est un fonds d’investissement d’impact de 325 millionsUSD.

UBS, avec, entre autres, le chanteur de U2, Bono, bien connu pour son engagement humanitaire, a levé ces 325 millions pour servir leur base de clients souhaitant combiner rendement et philanthropie.

Selon Simon Smiles, chef des investissements chez UBS Gestion de patrimoine pour les clients à très haute valeur nette, les clients veulent placer leur argent dans ce genre d’investissement. En ce moment, l’intérêt pour ce genre d’actifs dépasse amplement l’offre.

L’investissement d’impact canadien a sa plateforme

En décembre dernier, Social venture connexion (SVX) a lancé sa plateforme numérique permettant aux investisseurs intéressés par l’impact autant que par la possibilité de retour financier sur investissement de trouver des projets d’entreprises conjuguant ces deux volets.

Avant de se lancer en ligne, SVX a démarré humblement ses opérations de mises en relations (« matchmaking ») par des conférences, des colloques et des séminaires en 2013 afin d’allier des investisseurs désireux d’avoir un impact avec des entreprises sociales qualifiées qui ne sont pas inscrites en Bourse, mais dont les projets nécessitent un appel à l’épargne via le financement participatif ou l’investissement privé.

Avant d’être autorisées sur la plateforme SVX et lever des fonds, les entreprises doivent passer par une analyse d’impacts de leurs produits ou services.

C’est ainsi qu’une douzaine d’émetteurs se sont joints à la plateforme SVX pour offrir aux investisseurs de l’Ontario, du Québec, de l’Alberta, de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan (il s’agit des provinces ayant dispensé SVX des règles habituelles s’appliquant aux marchés financiers) une participation financière à leurs projets.

Par exemple, CoPower , dont nous avons déjà parlé des obligations vertes, y offre toute sa panoplie d’investissements visant des infrastructures d’énergie propre (éolienne, géothermie) dont les impacts sociaux et environnementaux sont mesurables.

On peut aussi citer EarthShield, une entreprise de biotech au stade précommercial qui produit une biorésine appelée EarthSkin, développée pour aider les fermiers et leurs communautés à augmenter leur productivité, réduire leurs coûts et améliorer leur environnement.

SVX accueille également une entreprise peu connue au Québec, la First Nations Bank of Canada (FNBC), fondée en Saskatchewan en 1996. Cette banque à propriété majoritaire de membres des Premières nations possède maintenant huit succursales et cinq centre de services dans des communautés autochtones de huit provinces et territoires pour servir 12 700 clients. Un geste intéressant sur la longue route de la réconciliation du Canada avec ses Premières nations.

SVX n’est pas la seule dans le monde à se lancer dans de telles initiatives, la Social stock exchange de Londres est très avancée dans son offre de services, semblable à une bourse traditionnelle.

Un FNB au féminin

J’ai déjà présenté dans ce blogue quelques initiatives de placements qui s’appuient sur le leadership féminin ICI et ICI. En décembre dernier, Placements MacKenzie a annoncé, qu’elle ajoutait un FNB (Fonds négocié en bourse) s’appuyant sur des actions internationales d’entreprises qui mettent l’accent sur les avantages de la représentation des gemmes dans des postes de direction : le FNB mondial de leadership d’impact Mackenzie (sigle MWMN de la NEO Bourse Aequitas).

Ce FNB est composé à 99% de sociétés qui ont deux femmes ou plus à leur conseil d’administration et 86% des sociétés dans le fonds ont trois femmes ou plus à leur conseil. Il est intéressant de noter que les sociétés choisies sont caractérisées par des proportions de femmes au conseil ou à la haute direction deux fois plus élevées que la moyenne mondiale.

Le postulat dans la documentation de présentation est sans ambages : « La représentation des femmes dans des postes de direction stimule le rendement des entreprises ». Pourquoi? Une plus forte mixité présente une meilleure gouvernance et une plus grande réussite en matière d’innovation. Le tout réuni se traduit en résultats d’entreprises potentiellement meilleures.

Et voici deux graphiques tirés des études sur lesquels Placements Mackenzie s’appuie:

Graphique 1

Graphique 2

 

Ce nouveau FNB investira principalement dans des sociétés de partout dans le monde qui favorisent la diversité des genres et le leadership des femmes. Malheureusement, à cause de sa nouveauté (il a été lancé en novembre 2017) les principales sociétés composant le fonds, comme leur répartition ne sont pas encore divulguées. Le Fonds est géré par Pax World Management, une entreprise américaine pionnière en investissement responsable. Pax évalue les placements potentiels en fonction de divers critères, dont la représentation proportionnelle des femmes au sein des conseils d'administration et dans des postes de direction d'entreprises, y compris en tant que chefs de la direction et chefs des finances.

Il est intéressant de noter comment MacKenzie justifie un tel FNB. Selon des sondages Environics qu’elle cite, une proportion de 91 % des investisseurs canadiens s'attendent à augmenter ou maintenir leurs investissements socialement responsables au cours des deux à trois prochaines années.

Plus de transparence pour le climat

Le Task Force on Climate-related Financial Disclosure (TCFD), sous la direction du financier Michael Bloomberg, a tenu la conférence Investor and Company Actions on disclosure of climate risks and Opportunities dans le cadre des rencontres sur les changements climatiques à Bonn en novembre dernier. Faciliter l’accès des investisseurs, des prêteurs et des assureurs à des informations permettant de mieux évaluer les risques et les opportunités liés aux changements climatiques a été le sujet principal de cette conférence.

Le TCFD est un groupe de travail issu du Conseil de stabilité financière placé sous l’égide du G20. Ses membres proviennent d’organisations variées, y compris de grandes banques, de compagnies d'assurance, de gestionnaires d'actifs, de fonds de pension, de grandes sociétés non financières, de cabinets de comptabilité et d’agences de notation de crédit.

De cette conférence, il est ressorti que l’incertitude quant aux impacts des changements climatiques entraînera autant d’opportunités que de risques pour les investisseurs. Une mauvaise lecture de l’état des lieux ou une sous-estimation de la rapidité à laquelle certains effets des changements climatiques se manifestent peut mener à une mauvaise allocation du capital. Les conférenciers ont insisté sur le besoin de transparence de la part des entreprises et des investisseurs.

Rappelons que le rapport phare du TCFD de 2016 contient 11 recommandations structurées autour de quatre thèmes au cœur d’une décision d’investissement éclairée, à la lumière de la nouvelle donne climatique: la gouvernance, la stratégie, la gestion du risque, les cibles fixées et la mesure de leur atteinte.

Pour le TCFD, de nombreuses entreprises sont encore hésitantes à entreprendre l’évaluation du contenu carbone de leurs actifs, ce qui prive les investisseurs d’informations importantes. Une information de qualité, notamment quant aux actifs menacés par les changements climatiques et par les mesures mises en place pour atténuer les émissions, permettrait de diminuer l’exposition aux risques des décisions d’investissements.

Le TCFD estime que le coût d’adaptation aux changements climatiques lié aux changements climatiques par rapport à la totalité du stock mondial d’actifs gérables est estimé de façon très large entre 4 200 milliards et 43 000 milliards de dollars d’ici à la fin du siècle. Le rapport souligne toutefois que la transition anticipée vers une économie sobre en carbone nécessiterait environ un billion de dollars d'investissements par an, générant de nombreuses opportunités, notamment en lien avec le développement de sources d’énergie alternatives.

 

À propos de ce blogue

Dario Iezzoni est un entrepreneur et pionnier québécois de l’économie à impact positif. Il a, entre autres, mené l’entreprise Equita d’Oxfam-Québec a des sommets tant en termes de chiffre d’affaires, nombre d’employés qu’en rentabilité. Aujourd’hui, il est consultant en écorentabilité, impact et management responsable. Il enseigne aussi le marketing des entreprises sociales et collectives à l’ESG-UQAM. Son blogue, « Profits durables », présentera chaque mois des nouvelles québécoises, canadiennes et internationales liées à la finance durable. Qu’il s’agisse de nouveaux produits financiers, de conférences, de rapports ou de projets, ce spécialiste de l’impact social et écologique tiendra les lecteurs informés des initiatives les plus pertinentes.

Dario Iezzoni