Transformation numérique: commencez par le client, pas par les TI!

Publié le 03/06/2020 à 08:00

Transformation numérique: commencez par le client, pas par les TI!

Publié le 03/06/2020 à 08:00

Une poignée de mains humaine et numérique

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Selon un article du plus récent numéro du Harvard Business Review, le seul fait de poser la question «Quelle est votre stratégie numérique?» provoque la panique chez plusieurs dirigeants d’entreprises. Je les comprends!

Qu’est-ce que la transformation numérique? Par où commencer? Devrait-on adopter un traitement choc où l’on transforme l’entreprise de fond en comble en révisant le modèle d’affaires, les systèmes informatiques et les processus? Au contraire, devrait-on favoriser une approche des petits pas? Utilise-t-on la même solution, peu importe la taille et le contexte de l’entreprise? Voici des réponses à ces questions.

 

Qu’est-ce que la transformation numérique?

Permettez-moi cette définition teintée d’humanisme: la transformation numérique, c’est l’utilisation de la technologie pour améliorer l’expérience client et employé. Des façons de faire simplifiées, des employés plus engagés et plus productifs, ainsi que des clients plus nombreux, satisfaits et fidèles sont les principaux effets recherchés.

 

Par où commencer?

La transformation numérique doit débuter par le client. Il faut identifier ce que l’entreprise peut faire pour que chaque composante de l’organisation réponde aux attentes du client tout en augmentant l’efficacité opérationnelle. À cet effet, des solutions humaines (employés), matérielles, procédurales et bien entendu numériques doivent être élaborées.

Certes, le numérique est important, mais il n’est qu’un moyen. Si la technologie est mal utilisée, les conséquences peuvent être désastreuses pour une entreprise. Les journaux pullulent d’histoires d’horreur où la technologie a causé plus de tort que de bien.

Il faut connaître le client, comprendre sa réalité et identifier ce qui a de la valeur à ses yeux. Comment faire? Recherche quantitative (sondages), recherche qualitative (entrevues, observations), données provenant du CRM, plaintes, etc. sont autant de sources qui permettent d’identifier les attentes des clients. Lisez Value Proposition Design ainsi que Design Research pour vous inspirer.

Bien comprendre ce qui a de la valeur pour le client évite de travailler sur le mauvais problème (voir mon billet) et de partir sur de coûteux, inutiles et futiles «trips» technologiques.

Méfiez-vous de l’huile de serpent ou des détergents (!) promus comme des médicaments miracles par certains fournisseurs qui vous promettent une transformation numérique facile et sans effort. Même s’il y avait un remède magique, sans connaître le vrai problème, difficile de savoir si le traitement sera efficace. Peut-être sera-t-il trop léger, ou au contraire, trop fort, risquant de tuer le patient.

Il faut aussi connaître l’employé. Transformation numérique ou pas, il y aura toujours des humains pour accomplir le travail. Il ne faudrait surtout pas reproduire les erreurs des années 80-90 où les TI concevaient des systèmes — aujourd’hui ils les acquièrent ou les assemblent — et les imposaient aux employés qui devaient suivre des semaines de formation pour apprendre à les utiliser… et les subir pendant toute leur carrière. Il y a certes un coût de développement et d’acquisition, mais il y a aussi un coût d’utilisation. Et c’est sans compter les problèmes techniques qui font perdre à chaque travailleur jusqu’à 100 heures, par année. (sondage réalisé pour Nexthink). Ça fait mal!

À leur décharge, les TI ignoraient comment faire autrement à l’époque. Mais en 2020, il n’y a aucune raison pour que ces vieilles façons de faire perdurent, surtout quand on connaît les conséquences autant sur les employés que sur les clients. Sans clients, il n’y a pas d’entreprise… sans employés non plus!

L’employé est essentiel dans cette transformation numérique. D’où l’importance de marcher dans ses souliers.

La transformation numérique, c’est bien outiller ses employés par des systèmes informatiques performants, des outils technologiques bien intégrés et des façons de faire revues et simplifiées.

 

Traitement choc ou petits pas?

Les petits pas, qui se transforment en gains rapides sont des éléments motivateurs non négligeables dans l’engagement de toutes les composantes de l’organisation pour réussir sa transformation.

Nul besoin de tout jeter! Commencez par réaliser un diagnostic de votre entreprise. Faites de la recherche, produisez vos personas et les parcours client pour bien comprendre les moments où le client exprime un besoin non résolu ou là où ça fait le plus mal. Regardez aussi ce qui se passe du côté de l’employé. Il y a certainement une raison pour laquelle l’expérience client souffre. L’employé est peut-être mal outillé en systèmes et en processus. Analysez le problème sous toutes ces dimensions: humaines, matérielles, technologiques, procédurales… et trouvez des solutions.

Vous n’avez pas à transformer votre entreprise au complet. Identifiez ce qui a le plus de valeur pour le client, et travaillez sur ces éléments bien précis. Et n’oubliez pas de mesurer l’impact d’un tel changement (voir ce billet et cet autre). TNR (Taux Net de Recommandation), chiffre de vente et niveau d’engagement des employés sont des éléments à suivre attentivement.

 

Il n’y a pas de taille unique

Il faut aussi savoir s’adapter. La transformation numérique d’une boulangerie artisanale pendant la pandémie n’a pas la même ampleur que celle d’une grande entreprise.

Dans le premier cas, l’implantation d’une boutique en ligne à l’aide de Shopify, combinée à une revue des processus logistiques (gestion des commandes, préparation, cueillette/livraison) peut se réaliser en quelques semaines, voire quelques jours. Inutile d’utiliser un bazooka pour tuer une mouche.

Pour les grandes organisations, le problème est parfois plus profond, à cause notamment de leur structure en silos qui fait très mal (lire Are You Undervaluing Your Customers. Le fait qu’elles utilisent une multitude de systèmes informatiques désuets et non interconnectés contribue au problème. Et c’est sans compter les multiples normes, procédures et règles qui parfois écrasent la machine, compliquant inutilement la vie du client et des employés.

Cela dit, peu importe la taille, l’approche est la même: comprendre le client, identifier les irritants et les éléments de valeurs, trouver une solution, engager les employés concernés dans la conception d’une solution, la livrer rapidement, mesurer et s’adapter.

On parle de transformation numérique, pas de révolution numérique. Nul besoin de se départir de ce qui fonctionne pour repartir à zéro.

En 2018, Daniel Newman a publié un texte dans Forbes fort intéressant. Il dit «… la transformation numérique n'est pas un problème technologique, c'est un problème d'entreprise. C'est un problème de marque. C'est un problème de marketing, un problème de vente et un problème de RH.» Bien dit!

 

À propos de ce blogue

De kessé l’expérience client se veut un blogue pour les dirigeants, responsables de l’expérience client, et toute personne qui est en contact direct, ou indirect avec la clientèle. Le but? Démystifier l’expérience client sous tous ses angles. Daniel Lafrenière est stratège en expérience client omnicanale. Oeuvrant depuis plus de 30 ans, il a aussi donné des conférences au Canada, aux États-Unis et en Europe. Il est l’auteur de 10 ouvrages en expérience client, expérience employé et transformation numérique.

Daniel Lafrenière