Rachat d'actions de GM : pas une bonne idée

Publié le 10/03/2015 à 07:29

Rachat d'actions de GM : pas une bonne idée

Publié le 10/03/2015 à 07:29

Les investisseurs activistes ont un rôle important à jouer. Toutefois, les dirigeants doivent faire passer les intérêts à long terme de leurs actionnaires, bien avant eux. C’est ce qui me frappe dans la décision annoncée hier par le conseil d’administration de General Motors, cédant sous la pression de Harry J. Wilson.

GM a ainsi annoncé un important rachat d’actions, ce qu’exigeait M. Wilson, et en échange ce dernier ne demandera pas de siéger un conseil.

Or, j’ai des doutes immenses quant à la sagesse d’une telle décision car à mon avis, une société comme GM devrait y penser deux fois (et plus) avant de prendre son capital pour racheter de ses actions

Je sais, vous me direz que je me contredis car j’ai souvent écrit pour appuyer les rachats d’actions. J’ai aussi souvent, très souvent, critiqué les dirigeants qui conservent trop d’argent et qui devraient plutôt le verser à leurs actionnaires. Mais le diable est dans les détails, comme on dit.

En un mot, il y a tout un univers qui différencie une société comme Google avec des milliards en encaisse sur son bilan et une autre comme GM.

GM a convenu de racheter immédiatement pour cinq milliards de dollars (G$) US de ses actions, montant qui s’ajoute à un autre 5G$US qui devrait servir à racheter de ses actions d’ici la fin de 2016. Le fabricant d’autos a une valeur boursière d’environ 60G$US.

Je ne connais pas Harry Wilson. Il se dit investisseur à long terme, étant actionnaire de GM depuis 2011. Toutefois, il ne possède que 30 000 actions de GM, mais dit représenter des fonds qui possèdent au total plus de 30 millions d’actions (environ 2%). C’est plus impressionnant, mais pas vraiment suffisant, il me semble, pour lui donner une voix crédible.

M. Wilson a négocié avec ces fonds une rémunération de 4% des gains réalisés avec leurs actions de GM, ce qui sent assez mauvais, merci.

J’ai de la misère à concevoir un conseil d’administration céder sous ce genre de pression.

Par ailleurs, ma principale objection, c’est de voir une société qui était en faillite lors de la dernière récession, dilapider ses capitaux dans des rachats. Oui, GM a un bilan solide, plus solide que lors du cycle précédent.

Mais la direction doit voir loin devant elle et prévoir pour le très long terme, ce qui signifie se préparer pour les mauvaises années. Or, fabriquer des autos est une activité très cyclique. En récession, les ventes disparaissent et les pertes explosent. Il n’y a aucune raison pour croire que cela sera différent dans les prochaines années.

Bien au contraire en fait, car des compétiteurs de la nouvelle vague comme Tesla menacent la survie des fabricants «traditionnels» comme GM (et possiblement Apple). Ce qui devrait inciter les dirigeants à encore plus de prudence.

Concrètement, cela signifie investir massivement en recherche et développement et conserver un épais, très épais coussin d’encaisse.

En fait, l’idée en vogue actuellement à l’effet qu’une société, dès qu’elle a de l’argent en banque, doit racheter de ses actions, est une idée saugrenue. Par exemple, en février, les sociétés américaines ont annoncé des rachats totalisant 118,3G$US, selon Birinyi Associates, un record de tous les temps.

Je peux vous prédire qu’une bonne partie de ces entreprises ont de bonnes chances de regretter ces rachats dans les prochaines années.

Pour vraiment être intelligents, les rachats devraient être faits d’abord et avant tout par les sociétés qui génèrent de fonds autogénérés libres élevés, c’est-à-dire après leurs dépenses en capital. Certaines entreprises ont la chance de pouvoir exploiter sans avoir beaucoup besoin de capital, ce qui n’est certes pas le cas des GM de ce monde.

De plus, pour vraiment enrichir leurs actionnaires, les dirigeants doivent racheter lorsque leur titre se vend sous sa valeur intrinsèque. Et cela doit être évident.

Ne venez pas me dire que c’est le cas actuellement, alors que le S&P 500 en est à sa sixième année de marché haussier. C’est tout simplement ridicule.

Bernard Mooney

 

Blogues similaires

Canada Goose : le coup de froid

Édition du 26 Janvier 2019 | François Pouliot

CHRONIQUE. Le Canada a bon nom à l'étranger. Utilisons-le pour tenter de donner du levier à nos produits. Bonne ...

Shopify: prochaine victime de la malédiction boursière canadienne?

BLOGUE INVITE. Shopify est-elle différente des Nortel, Research in Motion, Valeant, Barrick Gold et autres?

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.