La guillotine et le papier sablé

Publié le 03/02/2015 à 07:36, mis à jour le 03/02/2015 à 14:01

La guillotine et le papier sablé

Publié le 03/02/2015 à 07:36, mis à jour le 03/02/2015 à 14:01

Photo: Shutterstock

Si vous me connaissez, vous savez que je ne passe pas de temps à étudier les graphiques boursiers. Je me concentre sur la réalité économique des entreprises et l’étude de leurs perspectives fondamentales. Toutefois, il y a une réalité psychologique qui affecte le comportement des marchés financiers qu’il ne faut pas oublier pour autant.

Je l’ai appris dans la vraie vie, au lendemain de l’éclatement de la bulle technologique. Après la dégringolade de l’indice Nasdaq, comme il était tentant d’acheter de ces titres technos après qu’ils aient perdu 50% de leur valeur! Pendant des mois, voire des années, on les avait suivis, avec admiration en raison de leur performance exceptionnelle, les Cisco Systems de ce monde. Toujours trop chers, on attendait ces titres avec patience.

Et la Bourse nous les a offerts sur un plateau d’argent. Sauf que le plateau s’est effondré lui aussi et il a fallu des années avant de vraiment faire un creux….

Ce phénomène n’est pas unique au Nasdaq; il s’observe en fait pratiquement à chaque fois qu’un marché s’effondre comme celui du pétrole depuis quelques mois. Et la meilleure façon de le visualiser est par l’analogie avec la guillotine et le papier sablé.

C’est le légendaire analyste de Merryll Lynch Robert Farrell (que j’avais commencé à regarder durant les années 1980 à l’émission Wall Street Week, animée par Luis Rukeyser) qui a le premier décrit ce phénomène.

En voici les grandes lignes :

Cela commence par une baisse des cours de 30, 40, voire 70%. C’est la guillotine. Ensuite, c’est la période du papier sablé, une période prolongée pendant laquelle les cours montent et baissent, sans vraiment aller nulle part. Cette période de surplace épuise tous ceux qui détenaient cet actif, tous ceux qui restaient en fait. Éventuellement, tous les investisseurs lancent la serviette et liquident peu importe les cours.

Évidemment, c’est une analogie. Ce n’est pas vrai que tout le monde vend, peu importe l’actif. Mais cela décrit assez bien la psychologie derrière le phénomène des cycles financiers.

L’idée centrale, simplement, c’est qu’il faut beaucoup plus de temps qu’on peut le croire avant qu’un véritable creux soit atteint après la baisse majeure des prix d’un actif. Souvent, il faudra des années avant de voir s’effriter l’engouement, progressivement, des investisseurs face à cet actif.

Un peu comme s’il fallait une bonne période de papier sablé pour nettoyer le marché et fournir une base qui constituera un creux solide.

Concrètement, cela signifie ceci: «si vous êtes tenté d’acheter du pétrole, au moins, soyez conscient du phénomène et
« prenez pour acquis que le prix du pétrole peut flotter entre 40 et 60$US le baril pendant longtemps. »

Si vous avez été assez chanceux pour éviter la guillotine, n’oubliez pas que vous aurez à endurer une période de papier sablé!

Bernard Mooney

 

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