Québec s'étale, le trafic la rattrape

Publié le 19/10/2013 à 00:00, mis à jour le 17/10/2013 à 09:52

Québec s'étale, le trafic la rattrape

Publié le 19/10/2013 à 00:00, mis à jour le 17/10/2013 à 09:52

Même si l'issue des élections municipales laisse peu de place au doute à Québec, Régis Labeaume bénéficiant toujours d'un grand soutien populaire, les enjeux économiques de la capitale n'en sont pas amoindris pour autant. La question des salaires et des régimes de retraite des employés de la Ville retient l'attention, mais aussi celle de la mobilité durable.

Québec n'est plus ce petit eldorado à l'abri de la congestion routière. Même si elle dispose de plus de kilomètres d'autoroutes par habitant que les autres villes canadiennes, les déplacements y deviennent de plus en plus ardus. Et pour cause : le nombre de véhicules de promenade en circulation a augmenté deux fois plus vite que la population, de 2006 à 2011. On compte désormais deux autos pour trois personnes en âge de conduire.

«Que l'auto amène tout le monde au travail n'est pas la solution de l'avenir», tranche l'économiste Jean-Pierre Aubry, fellow associé au CIRANO.

«Le tramway est devenu le choix incontournable pour Québec, ajoute Alexandre Turgeon, président de l'organisme Vivre en ville. On n'a pas la densité et le volume pour avoir besoin d'un métro. Et par ailleurs, le réseau métrobus est saturé presque depuis sa mise en service. On a réussi à passer de 55 000 passagers par jour à 58 000 en ayant recours aux autobus articulés, mais on arrive à saturation avec ce moyen.»

Régis Labeaume a semé l'étonnement au début de septembre en déclarant dans un discours que «la finalité du plan de mobilité durable est la mobilité, et le tramway n'est qu'un moyen d'y arriver». Devant l'Association québécoise des transports, il a dit vouloir l'autopartage, mais aussi «rien de moins qu'un réseau routier extraordinaire». Il a notamment plaidé pour l'élargissement à six voies de l'autoroute Laurentienne.

«Je pense qu'il subit beaucoup de pression de la part des animateurs de radio-poubelle ; il y a peut-être un calcul électoraliste là-dedans, mais c'est un mauvais calcul», estime M. Turgeon.

Les récents plans particuliers d'urbanisme du quartier Saint-Roch et de Sainte-Foy ont été bâtis en fonction du passage d'un tramway, un projet de 1,5 milliard de dollars, que M. Labeaume défend depuis 2010.

L'Institut de développement urbain du Québec (IDU) considère que le tramway doit se faire dans un avenir assez rapproché. Cela favoriserait le développement immobilier dans l'axe du transport et rendrait moins nécessaires les stationnements, donnant ainsi plus d'espace à l'immobilier.

«La Ville n'a pas les moyens avec son pouvoir d'emprunt de faire un tramway. C'est normal que ce soit le gouvernement du Québec qui paie», affirme le directeur régional Stéphane Dion, en précisant, comme Régis Labeaume, que le gouvernement provincial finance le métro de Montréal.

«Les municipalités ne peuvent en aucune façon planifier à long terme, parce qu'elles n'ont pas une base de revenus assez certaine. Leur donner un petit budget pour ceci et cela, ça ne fonctionne pas. Ça prend un gros chèque pour 20 ans», dit Jean-Pierre Aubry, pour qui le manque d'autonomie financière des municipalités favorise l'inefficacité du tissu urbain, avec les conséquences économiques qui s'ensuivent.

La gouvernance actuelle stimule le développement le long des axes autoroutiers, donc l'étalement, et crée des entonnoirs, ajoute Alexandre Turgeon.

«Une autoroute ne coûte rien à la municipalité une fois qu'elle a convaincu le gouvernement de la réaliser. Ça ne lui coûte rien en entretien non plus, contrairement au transport en commun. En effet, la Ville paie 50 % de l'investissement pour la mise en place d'un nouveau réseau d'autobus et partage les coûts d'exploitation avec les usagers», précise-t-il.

La conséquence est l'étalement urbain au détriment de la densification. De 1971 à 2006, la superficie urbanisée a augmenté de 261 % dans la région métropolitaine de Québec alors que la population croissait de 62 %. En 2012, note l'IDU, 68 % des projets de construction à Québec ont été réalisés hors des quartiers centraux. On bâtit plus loin, parfois avec aussi peu que neuf logements à l'hectare, ce qui génère des coûts d'infrastructures de 50 000 $ par logement. Et aucun système de transport en commun ne peut être viable avec une aussi faible densité.

«On peut atteindre 40 logements à l'hectare avec des habitations unifamiliales et une densité qui permet une desserte adéquate du transport en commun, tout en faisant vivre des commerces de proximité», fait valoir Alexandre Turgeon, spécialiste de l'aménagement du territoire.

Vivre en ville plaide pour la restriction du développement urbain hors d'un rayon de 800 mètres des arrêts d'autobus de Québec.

«Si on veut favoriser le développement des friches urbaines, il faut contraindre le développement ailleurs. Même à faible densité, les axes du transport en commun à Québec comprennent deux fois plus de terrains disponibles que les besoins en habitation des 25 à 30 prochaines années !»

Ces terrains ne sont pas développés en priorité par les promoteurs immobiliers, parce que leur valeur exige plus de densité pour amoindrir le coût par logement. Or, le zonage ne le permet pas nécessairement.

«Si vous voulez faire de la densité le long d'un axe de transport en commun, il faut à peu près tout le temps demander une modification au zonage. C'est plus long et plus compliqué», reconnaît M. Turgeon.

Sans compter que beaucoup de ces projets se heurtent à l'opposition citoyenne, ce qui déclenche une mécanique référendaire.

«Les quartiers centraux devraient être en zone franche, à l'abri des référendums. Un centre-ville ne devrait pas appartenir seulement à ceux qui y habitent, mais à tout le monde», affirme Stéphane Dion.

L'IDU, tout comme Vivre en ville, réclame une révision des règlements de zonage, qui datent d'une époque où personne n'avait encore à se soucier de congestion routière.

Pour favoriser la densification, l'IDU propose aussi la relance du programme d'aide à la décontamination Revisol, ainsi que la diminution de la contribution pour les parcs dans les quartiers centraux, qui ne peuvent plus beaucoup en accueillir de toute manière.

valerie.lesage@tc.tc

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