La guerre des produits de beauté que se livrent les chaînes de pharmacies québécoises s'intensifie : le Groupe Jean Coutu rénove ses établissements les uns après les autres, apportant un soin particulier à sa section de cosmétiques; Shoppers Drug Mart/Pharmaprix lance une nouvelle chaîne de boutiques indépendantes de ses pharmacies consacrée aux produits de beauté haut de gamme; Uniprix cible le segment de la dermo-cosmétique, tout comme Proxim et ses boutiques cosmétiques " à tendance verte ".
Plus que jamais, les pharmacies misent sur les ventes de cosmétiques, en hausse de plus de 6 % par an, pour pallier la baisse de rentabilité d'autres catégories, dont celle des produits bon marché, qui ont migré vers les Dollarama de ce monde.
Ce n'est pas un hasard si les chaînes de pharmacies se sont lancées massivement dans ce créneau, prenant au passage 12 % des parts de marché des cosmétiques au pays, et grugeant sans arrêt le territoire de grands magasins comme La Baie. " Les cosmétiques sont un secteur qui croît rapidement pour nous ", a dit en décembre dernier le pdg de Shoppers Drug Mart/Pharmaprix, Jurgen Schreiber, lors d'une conférence organisée par Morgan Stanley. Si l'ensemble des ventes de Shoppers ont crû de 5,9 % en 2009, le secteur des cosmétiques " performe bien davantage, et les produits de luxe encore plus que ceux de masse ".
Les pharmacies ont plusieurs atouts
Le secteur des cosmétiques attire en magasin une clientèle aisée, généralement fidèle, qui fait le reste de ses emplettes en même temps qu'elle achète ses petits pots.
Le marché des produits de beauté résiste assez bien aux récessions, procure d'excellentes marges de profit, notamment dans ses produits haut de gamme, et enregistre des ventes au pied carré très rentables, note Renaud Legoux, professeur adjoint en marketing à HEC Montréal. " C'est très attrayant ", dit-il.
Au cours des dernières années, les pharmacies ont brouillé les cartes et insufflé un dynamisme nouveau au secteur, au moyen d'une approche flexible, moderne, qui répond aux besoins des consommateurs, dit Dominique De Celles, vice-présidente principale de la division cosmétique active de L'Oréal Canada. " Elles ont plusieurs atouts pour se tailler une place dans le marché : un réseau très vaste, des heures d'ouverture étendues et la proximité de leur clientèle. "
Nicoline Martucci, gestionnaire de catégorie cosmétiques chez Uniprix, souligne que sa chaîne est présente dans tous les quartiers, partout au Québec, un avantage par rapport aux grands magasins, par exemple. " Nous offrons le même service, que ce soit au centre-ville de Montréal ou à Chibougamau. "
La concurrence plus vive que jamais
Mais les pharmacies ne peuvent pas se reposer sur leurs lauriers, car la concurrence est plus féroce que jamais au Québec.
Aux côtés des grands magasins, les boutiques spécialisées se multiplient. La chaîne française Sephora a ouvert ses deux premières boutiques dans la région de Montréal en juin 2008. Elle a compte aujourd'hui quatre au Québec. Les épiciers et les magasins à grande surface, dont Loblaws et Walmart, augmentent la surface consacrée aux mascaras et autres produits de beauté.
" Les pharmacies n'ont pas le choix de se battre, dit Renaud Legoux. Elles sont cernées de toutes parts. " Élaborer de bonnes stratégies est plus que jamais essentiel pour continuer à dominer ce créneau, ajoute l'expert en marketing. " Nous sommes dans un marché arrivé à maturité. Ni la population, ni la richesse n'augmentent. Elles doivent donc devenir plus efficaces. "
martine.turenne@transcontinental.ca
