Le secret des snowbirds

Publié le 01/01/2009 à 00:00

Le secret des snowbirds

Publié le 01/01/2009 à 00:00

À ce moment-ci de l'année, les snowbirds ont presque tous quitté le Québec pour aller se réchauffer sur les plages du Sud. Chanceux ? Pas seulement : ils ont surtout bien planifié leur retraite.

Comme d'autres retraités du monde entier, Brock Sharpe et André Girard ont craqué pour une destination floridienne aménagée pour les 55 ans et plus. "On y rencontre des gens de tous les milieux, essentiellement des Américains et des Canadiens, dit Brock Sharpe. J'ai toujours quelqu'un avec qui jouer au golf, et j'ai pu monter mon propre band."

Sans se connaître, ces deux Québécois migrateurs ont plus d'un intérêt en commun. Brock Sharpe est un ancien cadre de la société immobilière Commerce City Properties, à Ottawa, tandis qu'André Girard, résident de Brossard, était vice-président, Gestion d'actif, chez SITQ Immobilier. Mais ce sont des raisons différentes qui ont mené ces deux hommes en direction de la Floride. Asthmatique au point d'avoir du mal à respirer pendant les grands froids de l'hiver, Brock Sharpe, 66 ans, adore le soleil, si bénéfique pour sa santé. Quant à André Girard, 58 ans, il est un passionné des sports d'été : golf, natation, tennis, volley-ball, etc.

Après avoir loué des copropriétés et des maisons pendant quatre ans, Brock Sharpe et sa femme, Gale, ont finalement succombé au charme de Port St. Lucie, une petite municipalité de quelque 88 700 habitants située à moins de 150 kilomètres de Disneyland. Une ville paisible où les habitants sont plus âgés et plus riches que la moyenne nationale, et où les maisons ont la réputation d'être moins chères qu'ailleurs (environ 180 000 $ US). Parmi les attractions, on compte le PGA Village - un paradis pour les golfeurs -, le terrain d'entraînement des Mets de New York, la plage et les marinas.

André Girard et sa femme, Hélène Fortin-Girard, ont loué l'an dernier une maison mobile à Sun'nFun, dont la formule s'inspire de celle des Clubs Med, mais qui s'adresse aux retraités. Ils ont trouvé cet endroit par hasard, sur Internet. "Nous avons eu un tel coup de foudre que nous avons acheté", souligne André Girard. Le concept a en effet de quoi plaire. L'immense complexe compte plusieurs lacs, une piscine aux dimensions olympiques, dix-huit spas, six terrains de tennis, deux salles d'entraînement, un bar, un restaurant et une salle de spectacles pour 1 500 résidents. Ce cocon ultrasécurisé est situé à Sarasota, une ville de 369 500 habitants où l'on trouve de tout : musées, opéra, ballet, théâtre... La ville est bordée par une plage de plus de 12 kilomètres baptisée "Siesta Key", qui se perd dans les eaux turquoise du golfe du Mexique.

Faire face aux imprévus

Là-bas, le quotidien est marqué par un feu roulant d'activités. Un budget est donc essentiel, car il n'y a aucune limite à ce qu'une personne peut dépenser.

Même si vous y installez votre roulotte ou que vous demandez à un parent établi en Floride de vous héberger, vivre là-bas vous coûtera au moins 10 000 dollars par an, estime Daniel Bissonnette, président de Services financiers Planifax. "Et vous aurez encore des factures à payer au Québec : taxes municipales, frais de copropriété, loyer, etc.", ajoute-t-il.

Dans ces conditions, la seule façon de réaliser ce rêve sera... d'épargner ! Toutefois, même avec un bon coussin financier, vous devrez planifier soigneusement vos décaissements lorsque vous serez à la retraite. Et encore, vous ne serez pas à l'abri des imprévus.

Même si la dépréciation de la Bourse et du dollar canadien n'a pas empêché Brock Sharpe et André Girard de partir pour le Sud, les deux snowbirds conviennent que tout coûtera beaucoup plus cher cette année.

Il existe certaines stratégies pour gérer les variations du taux de change. Par exemple, se constituer un compte de placement en dollars américains. "Il est alors préférable de s'y prendre tôt et d'acheter des devises progressivement, de manière à cibler un prix moyen, étant donné que le taux de change peut varier énormément, même sur de très courtes périodes de temps", dit Jean-Rémy Deschênes, responsable affaires à la vice-présidence, Gestion des avoirs, au Mouvement Desjardins.

Une autre solution consiste à choisir la destination de votre séjour en fonction de la valeur de la devise. "Cette année, par exemple, un snowbird pourrait mettre le cap sur le Mexique ou Panama", souligne Daniel Bissonnette.

La devise n'est pourtant pas la seule source d'incertitude quand on séjourne à l'étranger. Le moindre incident peut aussi compromettre sérieusement ce rêve. Avant de partir, assurez-vous d'avoir une bonne compréhension des risques et une couverture adéquate : une assurance voyage, une assurance habitation (si vous êtes propriétaire) et peut-être même... une assurance automobile. En effet, beaucoup de Québécois ignorent encore la gravité des conséquences que peut avoir aux États-Unis un accident de voiture dont on est responsable impliquant plusieurs blessés. Le montant d'une assurance responsabilité civile peut être rapidement atteint, même si on est assuré pour un million de dollars.

Acheter ou louer ?

Lors d'un séjour dans l'un de ces endroits de rêve, vous risquez de vous laisser séduire par un palace au bord de la mer, une copropriété charmante ou une de ces enclaves résidentielles ultraprotégées. Pour un peu moins de 100 000 dollars, et jusqu'à quelques millions de dollars américains, vous pourriez devenir propriétaire.

Brock Sharpe et André Girard n'ont pu résister à la tentation. Leurs connaissances de l'immobilier les ont toutefois poussés à acheter dans un endroit bien géré, au concept novateur. "À Sun'nFun, tout est fait pour mettre les propriétés en valeur, dit ce dernier. La gestion des lieux est fantastique ! Aucune maison mobile ne tombe en décrépitude."

Dans l'esprit d'André Girard, cet achat d'environ 100 000 dollars américains représente l'équivalent de ce qu'il aurait pu payer pour acquérir une résidence secondaire au Québec. À ce chapitre, il a fait l'inverse de Brock Sharpe, qui a conservé son chalet, mais s'est départi de sa résidence principale en banlieue d'Ottawa. Le capital ainsi libéré lui a permis d'acheter en 2006 sa villa floridienne.

"Nous avons même déménagé les meubles ! souligne-t-il. Comme nous passons six mois par an en Floride, acheter une maison était la meilleure solution, ajoute-t-il. Bien entendu, cette décision dépend des moyens financiers de chacun..."

En devenant propriétaire, Brock Sharpe et André Girard ont néanmoins pris un certain risque. "Personnellement, je déconseille ce genre d'achat, dit Danielle Bissonnette, à cause de l'entretien, de la sécurité, des lois, des assurances et de la revente. À mon avis, le temps partagé et la location sont des formules mieux adaptées."

Les lois et les règles compliquent tout de même les choses. En Floride, par exemple, les taxes foncières sont plus élevées lorsque les propriétaires ont un statut d'étranger. De plus, les frais de transactions sont généralement plus élevées qu'au Canada. Les nouveaux propriétaires doivent payer pour faire examiner les titres, souscrire une assurance-titres, débourser les frais de l'évaluation que la banque fera de la propriété et payer une taxe sur l'hypothèque.

"Il faut aussi penser à la succession, dit Jean-Rémy Deschênes. Il faut avoir un testament rédigé dans la langue du pays d'accueil et en fonction de ses lois." Aux États-Unis, par exemple, la succession peut être assujettie à des droits successoraux qui peuvent atteindre 45 % de la valeur des biens détenus. Pour un bien de 300 000 dollars, il faudra payer près de 135 000 dollars au gouvernement. Heureusement, la convention fiscale conclue entre le Canada et les États-Unis permet d'annuler le paiement de cet impôt dans le cas de successions dont la valeur ne dépasse pas deux millions de dollars américains.

"Avant d'acheter, il est préférable de louer, pense Michael Mackenzie. Une fois sur place, vous pourrez vous informer." Le fait de louer vous permettra aussi de vous déplacer et de chercher tranquillement votre coin de paradis.

"Par contre, lorsque vous l'aurez trouvé, arrêtez-vous, conseille Brock Sharpe. Sinon, vous pourriez passer le reste de votre vie à chercher."

ASSOCIATION

La Canadian Snowbird Association (www.snowbirds.org) compte 70 000 membres. Son but est d'informer les snowbirds, de défendre leurs intérêts et de leur offrir des services adaptés à leurs besoins.

ASSURANCE

N'oubliez pas le volet santé ! Le gouvernement du Québec rembourse seulement 100 dollars par jour pour une hospitalisation à l'étranger. "Or, aux États-Unis, la facture peut monter très vite, rappelle Michael Mackenzie. Une crise cardiaque peut facilement coûter 1 000 dollars par jour."

LE FISC AMÉRICAIN

En revendant votre propriété, vous devrez payer au gouvernement américain un impôt de 15 % sur le gain en capital, si vous avez possédé cette propriété pendant plus d'un an. Si vous êtes un résident canadien, ce gain en capital doit également être déclaré au Canada ; vous pouvez réclamer un crédit d'impôts étrangers pour tenir compte de l'impôt déjà payé chez l'Oncle Sam.

IMMOBILIER EN FLORIDE

Pour plus d'information sur l'immobilier aux États-Unis, lisez notre reportage "Floride : aubaine ou mirage", paru en février 2008.

aplus@transcontinental.ca

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