«C'est une priorité à très court terme» - Stéphane Bédard, président du Conseil du trésor

Publié le 02/03/2013 à 00:00, mis à jour le 28/02/2013 à 09:17

«C'est une priorité à très court terme» - Stéphane Bédard, président du Conseil du trésor

Publié le 02/03/2013 à 00:00, mis à jour le 28/02/2013 à 09:17

La gouvernance des projets informatiques du gouvernement nécessite des actions urgentes, selon le président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard. Ouvrir la voie au logiciel libre, réviser les pratiques contractuelles pour favoriser la concurrence et s'attaquer à la définition des besoins : le grand argentier du gouvernement du Québec veut faire le ménage pour générer des économies.

«Il faut être capable de contrôler notre risque par les choix qu'on va faire. On fera entrer de nouvelles technologies, dont le logiciel libre. À ce moment-ci, je peux le dire, on a brisé la barrière de la résistance. Il reste des mises en garde, mais je sens qu'on est en mode solution», a affirmé M. Bédard dans une entrevue avec Les Affaires.

Le député de Chicoutimi estime qu'il faut changer, au gouvernement, les règles qui sont en défaveur du logiciel libre. Il a rencontré ces dernières semaines les acteurs de cette petite industrie au Québec.

«À court terme, il faut mieux définir la place du logiciel libre. Il est urgent d'agir. On a manqué une étape. Le cadre politique s'est contenté de faire des lois qui n'ont pas de portée sur le plan administratif. Il faut voir comment on les intègre, pas juste dire qu'on le fera. C'est pour moi une priorité à très court terme», a précisé M. Bédard, qui prépare une stratégie pour le printemps.

S'affranchir des géants de l'informatique

Son objectif est de s'affranchir de la dépendance à l'égard des technologies fournies par les géants de l'informatique. À l'automne, le secrétaire général du gouvernement autorisait le renouvellement de licences Microsoft sans appel d'offres pour le ministère du Conseil exécutif, une décision justifiée par l'urgence et par une période de transition.

«On est en train de définir la stratégie pour intégrer les plus petits acteurs sans s'exposer au risque. Il faut maintenir la qualité et la fiabilité et en même temps, laisser la place à d'autres acteurs», dit M. Bédard.

Sa deuxième priorité sera de mieux définir les besoins informatiques avant d'acheter des solutions.

«On dit aux administrateurs d'arriver avec des résultats, alors qu'on ne s'est pas intéressé auparavant à une meilleure définition des besoins, ni au suivi, et encore moins à la finalité de la technologie. Je souhaite aboutir à des guides plus détaillés», a confié Stéphane Bédard, en ajoutant que beaucoup de gestionnaires se trouvent démunis face au suivi des contrats.

M. Bédard a demandé un état de la situation sur les ressources humaines en informatique au gouvernement. La perte d'expertise au sein de l'État a été dénoncée tant par le syndicat des fonctionnaires que par le Vérificateur général.

«J'ai mis la pression sur le monde et j'ai précisé que je suis prêt à faire plus [NDLR : embaucher]. Mais où sont nos gens et quels sont spécifiquement nos besoins ? À partir de là, on va agir.»

Stéphane Bédard estime aussi nécessaire de compartimenter la réalisation des projets informatiques pour limiter les risques de naufrage. Il reconnaît que les faillites de systèmes, dans lesquels des millions de dollars ont été engloutis, sont arrivées avec des projets paquebots, dans lesquels on tentait de tout prévoir d'un coup au lieu de bâtir pièce par pièce.

Le morcellement des projets favorisera aussi la concurrence, note M. Bédard, car les PME, tout autant que les géants comme CGI, LGS ou Fujitsu, auront des équipes suffisantes pour répondre aux besoins.

Maintien de la règle du plus bas soumissionnaire

Toutefois, la politique du plus bas soumissionnaire, que certains remettent en question parce qu'elle peut écarter les entreprises qui possèdent des expertises pointues (tarif horaire plus élevé, mais solutions possiblement plus rapides), sera maintenue. «Sinon, on s'expose à l'arbitraire», souligne M. Bédard. Mais il ajoute d'emblée avoir demandé qu'on mette les bouchées doubles pour réviser les pratiques contractuelles en informatique.

«Les liens contractuels ont mal évolué. Je ne suis pas spécialiste, mais j'ai vu qu'avec une seule clause dans un appel d'offres, on pouvait éliminer bien des acteurs. Que fait-elle là, cette clause ? Il y a une obligation d'agir de toute urgence pour mieux encadrer les pratiques contractuelles», estime le président du Conseil du trésor.

Entourés de hauts fonctionnaires qui ont chapeauté les TI au gouvernement depuis des années et qui ont participé à des pratiques aujourd'hui décriées, Stéphane Bédard se montre néanmoins confiant de pouvoir moderniser les approches.

«Il y a une résistance naturelle de l'être humain au changement, elle n'est pas propre à la fonction publique. Mais il y a une volonté de la tête dans plusieurs ministères. On s'en est assurés et on collabore.»

DÉBAT AUTOUR D'UNE AUTOROUTE... NUMÉRIQUE

Le président du Conseil du trésor Stéphane Bédard, le ministre des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne Bernard Drainville et même le PLQ affichent clairement leur volonté d'aller vers un gouvernement ouvert pour lutter contre la corruption et permettre aux citoyens de jouer leur rôle de chien de garde face aux actions gouvernementales. Mais la capacité de l'État à construire l'autoroute numérique pour tout le Québec est mise en doute par le dirigeant principal de l'information au Conseil du trésor. Elle est pourtant un rouage essentiel de l'accès à l'information.

«Il faut des investissements colossaux pour installer des lignes d'accès partout au Québec, et on a un contexte budgétaire», a affirmé le haut fonctionnaire Jean-Marie Lévesque aux participants du Webcom à Québec, le 19 février.

M. Lévesque a dit trouver «ambitieux» que le gouvernement joue un rôle de chef d'orchestre dans les infrastructures numériques. Ses déclarations ont fait bondir Daniel Blanche, pdg du Centre de recherche informatique de Montréal, qui participait au même panel sur la manière dont le numérique pourrait changer le modèle de gestion de l'État : «On ne remet pas en question le fait de construire des autoroutes pour la circulation automobile, parce qu'on connaît l'effet de levier économique, s'est-il exclamé. Dans le numérique, c'est la même chose. Et je crois, au contraire, que ça coûte très cher de ne rien faire. On regarde ça comme une dépense, mais c'est aberrant. La création d'emplois vient de l'économie du savoir.»

Le chercheur Michel Cartier, qui a participé à l'implantation d'Internet, en a rajouté.

«Ça fait 25 ans qu'on dit qu'on n'a pas assez d'argent et qu'on pellette ça à la génération suivante. Ce n'est pas vrai qu'on n'a pas assez d'argent, on ne fait juste pas les bons choix.»

À l'issue de l'atelier, M. Lévesque a précisé à Les Affaires qu'il faudrait étudier le rendement de l'investissement. Par ailleurs, il a laissé savoir que la stratégie sur l'économie numérique serait réactualisée à l'automne.

Les experts du numérique s'impatientent toutefois.

«Le Québec prend du retard. Cinquante-sept pays dans le monde ont pris le virage du gouvernement ouvert. Pendant qu'on réfléchit, des technopoles se créent», a réagi Jean-François Gauthier, de Démocratie ouverte, un organisme qui fait des représentations au gouvernement pour faire valoir les avantages économiques et politiques de l'accès à l'information.

valerie.lesage@tc.tc

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